Comme l’année dernière, Sera passera un peu de temps sur la côte normande. Le dimanche 20 juin, il est parti pour Honfleur, dont Henri de Rainier, originaire de ces lieux, aurait pu lui parler.
Dès le début du siècle, Honfleur attire les artistes, séduits par les vues qui s’ouvrent à l’embouchure de la Seine. Les noms de Corot, Diaz, Courbet, Arpigny, Troyon, Daubigny ont fait la renommée de l’auberge de la ville de Saint-Siméon, surnommée le “Norman Barbizon” et située au milieu de la pente de la Grasse, le long de la route menant à Trouville. A Honfleur a notamment travaillé Yongkind, “un délicieux prédécesseur” des impressionnistes, selon les termes de Signac. Un autre grand prédécesseur, Boudin, est né ici, dont la dextérité à transmettre des “beautés météorologiques” dans “des centaines de croquis pastel écrits au bord de la mer et sous un ciel clair”, exalte Baudelaire. Monet, Sisley et Basil ont également peint ici. “Ces lieux sont paradisiaques”, écrivait Basil, qu’il emporta avec lui à Honfleur Monet à l’été 1864. – Nulle part ailleurs vous ne verrez de telles prairies gonflées et de si beaux arbres; les vaches errent partout et les chevaux sauvages s’ébattent. La mer, mais plutôt la Seine incroyablement large, est un merveilleux horizon pour une immense masse de verdure… “
Le pittoresque de Honfleur, avec son vieux port, l’église Sainte-Catherine, l’hôtel particulier du gouverneur royal, est bien connu. Le soufre – il vit avec un responsable des accises, Monsieur Elouin au 15 de la rue Gras – ne se limite pas à ces “vues”. Il marche le long du talus ou de la côte, scrutant la mer, qui lui semble une vague couleur grise, “même avec le soleil le plus brillant et le ciel bleu”. Le baromètre indique le beau temps. Le soufre esquisse toujours pour “se mettre à l’aise”.
Cette année, il travaille plus agressivement que l’été dernier à Grancan. Il voudrait apporter un assez grand nombre de toiles de Honfleur, et il est impatient de les reprendre. Mais dès qu’il ouvre plusieurs ports de plaisance, des obstacles surgissent. Début juillet, les vents se lèvent, les nuages recouvrent souvent le ciel et Sera ne peut pas observer l’ombrage. Autre nuisance: en commençant à dessiner un coin du port avec des navires à la marina, huit jours plus tard, il a été contraint de quitter la toile au stade du croquis élaboré, car les navires s’étaient ancrés. L’agitation des marinas n’est évidemment pas très adaptée à la manière minutieuse de Sera.
Tout cela interfère avec son travail, mais ne l’interrompt pas du tout. Il a commencé par une demi-douzaine de tableaux: “Entrée du port”, “Partie du centre commercial”, “Côte de Ba-Buten”, “Embouchure de la Seine”, un croquis avec une photo de l’hôpital Honfleur et du phare voisin. Le soufre travaille sur l’une ou l’autre de ces toiles, “pointant” avec une précision encore plus grande qu’auparavant. Il n’y a pas une seule silhouette sur ces rives ou quais – ni baigneur, ni marin, ni passant. Les seules créatures “vivantes” ici sont quelques navires – voiliers ou bateaux à vapeur. Les lignes de remblais, jetées, phares et mâts introduisent une géométrie stricte dans la composition, ce qui renforce l’originalité envoûtante de ces scènes privées de personnes.
Ils sont le reflet de la vie de l’artiste lui-même, au cours de son parcours, rien ne semble interférer sauf des méditations incessantes et persistantes sur la peinture. Le soufre communique, peut-être, avec un Signac, auquel il envoie occasionnellement des lettres laconiques, leur but est de “maintenir le feu”. Un sourire apparaît parfois sur son visage, s’il lit une note dans un journal, où le “néo” est appelé “tashists”… Mais quelle dureté cachée devrait posséder l’âme de ce solitaire? “Nous allons nous enivrer à nouveau de la lumière, c’est réconfortant”, – alors il termine une de ses lettres à Signac.
Début août, il résume son travail à Honfleur. Aucun de ses tableaux n’est encore achevé, aucun n’est “insatisfaisant”, à l’exception du “Harbour Corner”, où il ne reviendra pas. . De retour à Paris, Sera terminera ses travaux en leur consacrant des semaines, voire des mois de travail en atelier. Avant de quitter Honfleur, il reviendrait à nouveau sur le thème des navires à l’embarcadère et dessinerait le vapeur amarré Maria.
Vendredi soir 13 août – “Moi, si superstitieux, j’ai eu de la chance!” – Il partira pour Paris, où une deuxième exposition indépendante devrait s’ouvrir dans une semaine, qui durera du 20 août au 21 septembre.