Matin – Claude Lorren

Matin   Claude Lorren

Les paysages de Claude Lorren, ainsi que les peintures philosophiques de son contemporain Poussin, ont été l’un des sommets du classicisme français. Certes, il est difficile de trouver des artistes plus différents que ces deux maîtres qui partageaient la primauté dans l’art de leur époque. Poussin, un penseur profond et concentré, vivait dans un monde de culture stricte et élevée, vérifiant chaque étape de son travail avec la théorie, subordonnant l’inspiration involontaire à la discipline de la pensée analytique.

Claude Jelle était un simple, semi-lettré, autodidacte, avec des difficultés à signer ses propres tableaux. En Italie, où il a passé presque toute sa vie, Lorren est venu comme serviteur et pâtissier, et ses premiers pas dans l’art sont déjà à son âge avancé. Ce à quoi Poussin est arrivé avec le travail complexe et intense de la pensée, Lorren l’a réalisé par instinct direct. Possédant une susceptibilité rare, il maîtrisait spontanément l’esthétique harmonieuse et claire du classicisme, la remplissant de la gaieté qui l’inspirait d’amour pour la nature et de communication continue avec elle.

Quatre des paysages de l’Ermitage représentant différentes heures de la journée – matin, midi, soir et nuit – sont parmi les meilleurs des meilleurs tableaux de Lorren. Il n’est pas encore établi si ces toiles ont été conçues par l’artiste dans son ensemble ou si elles ont été accidentellement, et avec beaucoup de succès, réunies par des collectionneurs d’une époque ultérieure. Mais d’une manière ou d’une autre, ils restent la preuve de la vive attention avec laquelle Lorren a étudié les changements dans la nature.

“Morning” est le plus poétique et le plus subtil de ces tableaux. Soumis à la tradition classique, Lorren a introduit la soi-disant intrigue historique dans l’image – une composition obligatoire qui anime le paysage. Il a choisi un épisode de la Bible pour cela: Jacob, faisant paître un troupeau de moutons, rencontre les filles de Laban, et cette rencontre marque le début de son long amour pour Rachel. Mais dans l’intrigue, pour l’artiste, seule l’association avec ces pensées et expériences que l’image se réveille à l’aube de la nature provoque en lui est importante. Comme dans d’autres travaux, Lorren confie l’exécution des chiffres à l’italien Filippe Lauri. Lui-même est complètement absorbé par le paysage, idylliquement paisible, spiritualisé et sublime.

Des couleurs claires et claires, avec leurs nuances douces, donnent aux formes légèreté et apesanteur. Lorren renforce cette impression en donnant une grande place au ciel et en éloignant les bâtiments, le pont, les collines, pour qu’ils se transforment en un panorama transparent, non dit mais à couper le souffle. Les arbres au centre de l’image et les colonnes du temple lointain acquièrent des proportions harmonieuses, la grâce des lignes et la pureté de la silhouette. Lorren transforme et renouvelle de manière méconnaissable le paysage classique, le remplissant du souffle vivant de la nature.

Le tableau est entré à l’Hermitage en 1815 à partir de la collection de l’impératrice Joséphine au château de la Malmaison près de Paris.

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